Do you want a drink?

17h30. L'heure de mon service. J'étais arrivée avec un peu d'avance, ce soir. J'avais à parler avec Sam, en espérant qu'il serait là. De choses et d'autres. Des histoires sans importance, pour la plupart. Mais aussi, et surtout, d'un petit point très important pour moi... J'avais besoin d'une avance de salaire. Le genre de chose que j'ai horreur de réclamer, bien évidemment. Malheureusement, mon chauffe-eau avait décidé de rendre l'âme et il fallait que je le change. J'aime mon petit confort, mine de rien. Et de l'eau chaude pour prendre ma douche, et bien... Cela fait partie de mon petit confort. Et cet après midi, quand j'ai voulu me laver la tête et que je me suis rendue compte que, tout à coup, il n'y avait plus d'eau chaude, j'ai bien été obligée de terminer à l'eau froide. Et autant dire que ça m'a mise de mauvaise humeur pour le reste de la soirée. Je n'allais, quand même pas, aller me laver chez Bill sous prétexte que c'était mon petit ami et que lui, il avait un chauffe-eau en état de marche... si?

Si. Il faut croire que oui. Puisqu'en arrivant au Merlotte's, j'ai bien été obligée d'admettre que Sam n'était pas là. C'est Terry qui s'occupait du bar ce soir. *Et m....*

C'était bien ma veine, tiens... Je n'ai rien conter Terry. Au contraire. C'est quelqu'un de gentil, quand on sait comment le prendre. Mais, concrètement, ce n'était pas lui qui allait pouvoir résoudre mes problèmes d'argent. Sur le coup, je me suis prise à espérer l'arrivée d'un certain vampire blond ce soir. Un appel, n'importe quoi. Je n'aimais pas quand il faisait appel à moi, mais dans les cas d'urgence...

Je poussai un petit soupir. Je n'en revenais pas moi-même de souhaiter cela. C'était, juste, contre nature. Il se servait de moi et de ma télépathie pour m'amener à faire ce qu'il voulait. Et le pire? C'est qu'il y arrivait parfaitement. Impossible de résister quand il appelait. Et pourtant, ce n'était pas l'envie qui m'en manquait, de l'envoyer paître... Mais il était le chef de zone de Bill, et je ne voulais pas que Bill ait des problèmes avec lui, à cause de moi. Il en avait déjà eu assez comme ça...

Je passai mon tablier autour de mon uniforme du Merlotte's: pantalon noir, sweater blanc avec le macaron du bar et pris connaissance de mes tables. Pour l'instant, il n'y avait pas encore trop de monde. Tant mieux. J'allai prendre la relève de ma collègue, me renseignant sur qui avait commandé quoi, puis m'installai derrière le comptoir en attendant que quelqu'un s'installe dans ma zone ou qu'un client commande autre chose.

[libre]

La porte s’ouvrit sur une petite brunette aux yeux vairons, l‘un bleu-gris, l‘autre d‘ocre et de vert. Ses cheveux épars autour de son visage, elle portait un épais pull de laine blanche semblable à un nuage de douceur à col roulé et une mitaine tout aussi opaline à la main gauche visible comme elle ramenait ses cheveux sur les côtés et balayait sa frange. Une jupe noire longueur genou complétait sa tenue, et des bottes de cuir noir à talons claquaient sur le damage.

Une mallette en main, elle fit le tour de la salle des yeux et avança vers une table un peu à l’écart des autres, posant sa mallette à côté d’elle, dans lequel se trouvait un pc portable qu’elle avait toujours avec elle. Que ce soit pour le travail ou pour raison personnelle, elle ne quittait jamais ce petit bout de sa vie qui regorgeait mille et une notes, mille et un trésors qu’elle ne divulguerait que lorsque bon lui semblerait. Attendait-elle quelqu’un ? Difficile à dire.

Son regard arpenta de nouveau la salle et il s’arrêta sur une blondinette qu’elle identifia comme la serveuse et lui fit un petit signe de la main pour attirer son attention. Lorsque la serveuse approcha, elle lui sourit et lui demanda un chocolat viennois. Rien de tel que le magnésium du chocolat pour déstresser et la mousse chantilly… juste parce que c’était de la chantilly.

Un journal sortit aussi de la mallette, plié à la page des locations et elle en avait entouré un certain nombre, continuant son épluchage des petites annonces en attendant sa boisson. Elle passa un certain nombre de coups de fil, raya les annonces entourées, et finit par froisser le journal quand la serveuse revint près d’elle.

Une brunette arriva rapidement dans ma zone. Elle devait avoir à peu près mon âge. L'air très timide, elle s'installa à une de mes tables. Pour le coup, elle semblait quelque peu décalée, dans l'atmosphère chaleureuse et conviviale du Merlotte. Comme si elle venait d'ailleurs. D'un autre monde, presque. Je la regardai un instant avant de prendre un stylo et mon calepin pour noter sa commande. Justement, elle venait de me faire un petit signe de la main pour attirer mon attention.

Sourire aux lèvres, accueillante, je m'approchai de la table. On avait beau me traiter de folle, je n'en étais pas moins une bonne serveuse. Accueillante, ouverte d'esprit, souriante, chaleureuse. bon... Il ne fallait pas non plus pousser le bouchon trop loin, comme l'avait fait Bellefleur avec moi. Mais bon. Je n'en étais pas moins quelqu'un de sympathique et qui faisait bien son travail. De plus, je n'étais pas une écervelée, n'en déplaise à nombre de personnes ici. Je n'étais, certes, pas très... Cultivée dirons-nous, mais je n'en étais pas moins ouverte d'esprit. Et ma voix n'était pas la voix vulgaire et rauque des serveuses semi-asthmatiques des bistrots routiers. Bien au contraire. Elle était plutôt douce.

"Bonsoir, bienvenue au Merlotte's. Qu'est-ce que je vous sers?"

La commande fut rapidement prise. Je la notai machinalement sur mon carnet et m'en retournai derrière le comptoir pour préparer le chocolat viennois. Tout en le préparant, je l'observai du coin de l'oeil, sortir un journal et passer quelques coups de téléphone avant de faire une rature sur ledit journal. Cherchait-elle un travail? Un appart? Un rendez-vous? L'idée me fit sourire et je ne pus m'empêcher de laisser tomber mes barrières mentales alors que je revenais vers elle, le chocolat viennois sur mon petit plateau rond.

Quel ne fut pas mon choc de ne rien percevoir en provenance de son esprit! Comme Sam, d'ailleurs... Il n'y avait guère de différence. Un léger halo rougeoyant, quelques sensations diffuses, mais rien d'autre. Comme si la porte m'était fermée en pleine tête. J'étais, toutefois, habituée à ne rien laisser paraître de mon trouble et je déposai la tasse fumante devant la jeune femme.

"Je peux jeter votre journal, si vous n'en avez plus l'utilité... Merlotte's embauche, si vous recherchez un emploi..."[/color]

Elle n'était pas comme les autres. Comme les clients normaux du café, en tout cas. Elle était autre chose. Et je ne pouvais m'empêcher de la comparer à Sam, qui était un métamorphe. En était-elle une aussi? Sans nul doute. Ce n'était pas une vampire. Je l'aurais 'senti' dès son entrée dans le bar. Mais ce n'était pas une humaine normale non plus. Sinon, j'aurais mieux capté ses pensées. Et il n'y aurait pas eu ce halos autour d'elle.

J'attendais, près de la table, qu'elle me permette ou non de prendre le journal pour le jeter. J'étais tellement surprise de ne pas parvenir à capter ses pensées que j'en oubliai de remonter mes barrières mentales.

La serveuse n'avait pas tardé, et était venue lui apporter, quelques instants après avoir pris sa commande, la boisson demandée, sourire aux lèvres, très accueillante et chaleureuse, ce que Lenny n'était pas vraiment de prime abord. Mais face à la gentillesse de la jeune femme, elle sourit et la remercia pour le chocolat.

Sa voix était tout aussi douce que sa tournure le laissait présager, on lui donnait parfois moins de la majorité, malgré ses 33 années de vie, ou plus exactement, ses 26 années de vie et ses 7 années de non-vie, car elle considérait sa nouvelle condition comme monstrueuse.

Elle n'avait pas eu le choix, et ne l'avait pas davantage aujourd'hui, comme tous les prochains jours de sa nouvelle existence à laquelle elle ne voulait pas s'habituer, s'adapter. Pourtant, c'était bien le propre de l'homme, de s'adapter à son environnement, non ?

Encore une question qui lui traversa l'esprit et qu'elle ne prononça pas, ni maintenant, ni jamais d'ailleurs. Pour quiconque savait pour sa nature, elle n'était plus humaine. Pour elle-même, elle n'était plus qu'un monstre qu'il fallait sceller à chaque pleine lune.

"Ah euh... oui, vous pouvez le jeter, tous les appartements sont déjà loués... C'est très gentil de proposer, mais je travaille déjà pour le Times Picayune, c'est le logement qui pose problème..."

Elle ne perçut pas vraiment le trouble de la serveuse, songeant que son refus pouvait l'avoir déstabilisée. Ce qu'elle songeait en revanche, c'était que c'était bien la peine de travailler dans un journal et d'avoir les premières éditions si tous les appartements étaient déjà loués, même les colocations pourtant d'ordinaire plus difficiles à louer.