Little Cub in the Sky #. Cassandre

« Papa.. » Un son. On dirait des pleurs. « Papa.. Tu es là Papa ? »

Il devait être tard, très tard, ou bien très tôt. Cassandre n’avait jamais eu une bonne notion du temps, elle savait juste que la nuit était d’un noir d’encre & que la lune, pleine, était haut dans le ciel, bien qu’elle fût souvent dissimulée par d’énormes nuages gris.

Cassandre n’aimait pas la pleine lune, ou plutôt, elle la détestait. C’était difficile à expliquer mais l’enfant n’avait jamais ressentit le même attrait que beaucoup avait pour cette sphère argenté, et quand on lui demandait elle répondait simplement qu’elle la trouvait laide. Alors que c’était tout de même un peu plus compliqué que cela, mais bon cela ne resterait qu’un détail sans importance. Ce qui l’agaçait, au plus au point, c’était que son jumeau était lui, au contraire, totalement et littéralement subjuguée par cette stupide boule. Combien de soupirs avait-elle poussé, le trouvant idiot de rester ainsi pantois, les yeux émerveillés ? Un nombre assez élevé de fois, sans aucun doute.

L’enfant, vêtue de sa robe de chambre, serrant une poupée de chiffon contre elle, arrive enfin sur le seuil de la chambre à couchée. La sienne. Pourquoi son père pleurait-il donc ? Et pourquoi était-il dans la chambre de ses enfants ?

« Papa… ? »

« Cassandre, vas t’en ! »

Cassandre s’arrêta brusquement, la main toujours tendue vers la porte entrouverte de sa chambre. Son père ne lui avait jamais donné un ordre de cette manière. Elle ne comprenait pas. La fillette était tiraillée, d’un côté elle avait toujours obéit à son père sans jamais se poser de questions mais d’un autre côté elle voulait savoir ce qu’il se passait, savoir pourquoi son père, alors qu’elle n’avait jamais vu une larme couler sur ses joues, et plus que tout elle voulait savoir où était Maman et Pâris. Ce fut finalement le second choix qui l’emporta, et bravant l’injonction elle poussa cette porte du bout de ses petits doigts. Elle n’aurait pas dû..

« Je t’avais dit te t’en aller ! »

Elle ne pu répondre, répondre à cette phrase pleine de désespoir. Son père se tenait là, dans un coin de la pièce, et... Le reste de la scène était vraiment trop dure pour une petite fille de six ans, mais elle ne réussit pas à détourner le regard. Elle ne pouvait tout simplement pas. Son jumeau était allongé sur son lit, la blessure béante de son ventre l’empêchait de respirer correctement, un moment Cassandre avait même cru que son grand frère ne respirait déjà plus. Elle voulait demander à son père pourquoi Pâris était si mal, comment il avait pu se faire ça. Certes il avait déjà bien des bêtises, mais se blesser d’une telle manière.. c’était inconcevable. Mais les mots lui manquaient, elle n’arrivait pas à formuler cette question qui lui brûlait les lèvres, alors elle s’approcha. Voulut consoler la moitié d’elle-même.

C’est alors qu’elle vit ce que tenait son père, la forme sur laquelle il était penchait. Sa mère. Sa maman qui semblait avoir aussi mal que Pâris, bien qu’elle ne voyait pas ce qu’elle avait, elle voyait juste le sang qui couvrait le sol. Du sang ? Hurlant le nom de ces êtres chers, elle voulut les rejoindre, les cajoler, pour les aider à guérir vite. Elle voulait que sa mère puisse à nouveau la prendre dans ses bras, que son frère joue à nouveau avec elle. Elle ne voulait pas qu’ils soient malades. Son père se montra, évidemment, plus rapide qu’elle et la retient dans ses bras avant que la petite ne puisse faire trois pas. Elle se débattait, hurlait, pleurait mais rien n’y faisait, il la porta hors de la pièce.

Le reste elle ne s’en souvenait pas vraiment. Son père l’avait emmené jusqu’au salon, enfin elle en était pas vraiment sûre mais qu’importe, il avait tenté de la consoler bien que ses efforts restèrent vain. Il n’était lui-même pas vraiment en état et Cassandre ne voulait rien entendre, elle voulait retourner auprès de sa mère et de son frère. Finalement l’épuisement l’emporta sur sa volonté et elle tomba de fatigue. Au réveil elle découvrit que la moitié de sa famille s’en était allé. Elle n’avait pas pu leur dire au revoir, ce qu’elle ne se pardonna jamais.

Comment Cassandre avait-elle échappé au massacre ? Alors que même son père avait eu à faire aux meurtriers de sa mère et de son jumeau. Il lui fallu longtemps pour s’en souvenir, bien plus que le temps que pris son père pour lui avouer la vérité : Pâris avait à nouveau voulu observé la lune, comme toujours, et cette nuit il avait ouvert la fenêtre pour s’assoir à son rebord. C’est alors que deux créatures, ayant remarqué la lueur de la bougie que l’enfant avait allumé, saisir l’occasion bondir dans la pièce, blessant le petit au passage. Leur mère qui avait quitté le lit conjugal pour satisfaire un besoin naturel, se trouvait dans le couloir à ce moment & entendait un bruit anormal pénétra dans la pièce. Devenant la proie suivante. Terence était alors intervenu, réussissant à chasser les créatures, payant le prix fort : il devint l’un des leurs, un Lycan.

5o ans plus tard, après avoir appris cette réalité, Cassandre se souvenu. Si elle ne fut pas transformée par ses bêtes c’était parce qu’elle s’était réfugiée dans le débarrât. Parce qu’elle ne supportait plus la lueur de la lune, et encore moins les soupirs de bonheur de Pâris. Pourquoi n’avait-elle rien entendu ? Ça elle ne le saurait sans doute jamais. Mais.. elle aurait dû mourir avec Pâris… Elle en souffrait.

« Mais pourquoi ? Pourquoi t’obstines-tu à faire comme ci de rien n’était ?! »

Ses doux yeux verts étaient remplis de larmes. Jamais Cassandre n’avait pensé qu’elle ressentirait un jour un tel désespoir, se sentir à nouveau abandonnée, impuissante. Elle qui avait pourtant mis tout en œuvre pour s’en préserver. Efforts vain. La jeune femme s’était depuis longtemps résignée à ne plus jamais pouvoir goûter au bonheur, à une vie normale. Son frère & sa mère l’avaient quittée dans des circonstances qui lui donnaient encore des cauchemars, et quand elle avait cru pouvoir partager sa vie avec un être, elle qui n’aurait jamais cru qu’un être puisse toucher son cœur avec une telle intensité, espoir trompeur, elle avait à nouveau tout perdu.

Pourtant Cassandre aimait toujours Ézéchiel, elle se fichait qu’il fût un Vampire. Elle avait pourtant fortement souhaité que ses sentiments s'éliment sous le poids de six cents longues années, mais rien n’y faisait, pas même la manière dont il la rejetait parfois. Elle était meurtrie, mais rien ne parvenait à la raisonner. Pour elle tout se résumait à une simple erreur, un énorme malentendu, mais ce qui était fait était fait et rien ne pourrait être réparé. Elle en était bien consciente. Son père avait simplement réagit un peu trop vite, mais il ne contrôlait pas encore sa nouvelle situation, ce n’était pas sa faute. Et puis il avait simplement voulu protéger les enfants de la famille Williams, auxquels il s’était déjà tant attaché. Elle regrettait ce geste, malencontreux, qu’il avait eu mais elle ne lui en voulait pas. Ce n’était pas sa faute à lui. Celui qu’elle rendait responsable de tout, c’était le patriarche de la famille Williams. Ce qu’elle gardait bien pour elle.

Dans ses bras, elle tenait un jeune enfant. Il était si pâle qu’on aurait pu le croire mort, sa respiration était difficile. Ces derniers mois son état s’était considérablement empiré, et rien de ce qu’elle faisait n’arrangeait la situation. Elle pataugeait. Elle ne comprenait pas pourquoi il dépérissait ainsi, le fait que sa mère soit un Lycan et son père un Vampire en était-il vraiment la seule raison. N’avait-elle simplement pas de chance, son enfant était malade comme parfois cela arrivait, même chez les simples humains ? Elle aurait voulu que la seconde option estompe les faits, mais la demoiselle ne se leurrait point. Seule la première était valide, et tout portait à croire qu’elle n’avait simplement pas de chance. Mais il y avait une solution, une qui arrangerait tout. Elle le savait depuis qu’elle avait mis au monde son fils.

Malheureusement elle ne pouvait faire cela seul. Elle avait besoin d’un Vampire. Sauf qu’il n’y en avait qu’un seul à qui elle pouvait demander d’étreindre son fils. Un seul qui pourrait accepter de sauver le fils étant lié à la race que détestaient pourtant ses sangsues. Son propre père, Ézéchiel. Hélas, malgré ses supplications il fuyait toujours, refusait de l’aider. Tant de cruauté lui semblait anormale de sa part, mais elle n’en démordait pas. Cassandre avait passé énormément à lui courir après, bien que cela ne lui plaise guère, mais elle avait toujours cet espoir qu’il accepterait, qu’il changerait d’avis. Pendant ce temps, elle confiait son petit à Jun, qui prenait grand soin de lui. Mettre son père au courant lui paraissait être la pire des idées, elle craignait sa réaction. Peur qu’il la rejette à son tour.

« Je ne te demande rien de plus.. »

Elle avait du mal à trouver les mots, ceux qui parviendraient enfin à le toucher. Mais, étrangement, elle avait l’impression que le temps pressait de plus en plus, que cette fois ne promettrait pas une autre chance. Que le temps était… compté.

« Fais le pour moi… » Ces larmes étaient désormais abondantes sur ces joues. « Je te promets que je m’en irais après si c’est ce que tu souhaites… » Une dernière inspiration. « ..S’il te plait… »

Et cette fois, il avait enfin accepté. Accepté de sauver cet enfant qu’il semblait détester. Elle lui avait juré qu’elle s’en irait, qu’elle lui laisserait vivre sa vie. Jamais une promesse ne lui avait autant coûté, mais elle était prête à beaucoup de sacrifices pour cet enfant. Peut-être qu’à cette époque elle avait eu une lueur espoir qui persisté, celle qu’il changerait enfin d’avis. Pour revenir vers elle. Lueur qui fût soufflé comme la flamme d’une bougie mourante. A l’instant même où les crocs allaient effleurés sa tendre peau du cou de l’enfant, elle cru que son monde allait s’écrouler. Un simple regard, un simple effleurement de ses petits doigts sur la peau de l’immortel, et l’enfant rendit son dernier souffle. S’en était trop, pourquoi fallait-il qu’on lui arrache toujours les êtres les plus chers ? Sans un mot, sans même réfléchir, elle avait arraché le corps des bras de celui qu’elle aimait. Et elle s’était sauvée sans même se retourner. Cassandre ne se souvenait même plus si elle avait espéré qu’il la rattrape ou non.

Rentrée chez elle, c’était tout ce qui comptait pour elle à cet instant. Elle en avait même oublié son père, qui ne savait rien. Mais lorsqu’il la découvrit, après être entrée dans le hall de leur nouvelle demeure, il était trop tard pour marche arrière. Il était inutile de lui caché la vérité, la ressemble d’Aaron avec son père était frappante, trop frappante. Elle se souvenait qu’elle avait toujours eu du mal à regarder cet enfant, il ravivait trop de souvenirs en elle. Ce n’était pourtant pas sa faute.

« Cassandre ? »

« Fiche moi la paix.. ! »

Il lui fallut presque quatre jours pour s’en remettre, accepter de se nourrir de nouveau, et surtout d’avouer la vérité à son père. Terence ne l’avait pas rejetait comme elle l’avait cru, au contraire, il avait été présent plus que jamais pour elle. Cependant il avait juré que le responsable aurait à répondre de ses actes. Cassandre n’aimait pas que son père ne cessa jamais de penser à cet événement, mais au fond elle n’arrivait pas à pardonner entièrement à son premier amour. Cela faisait dix ans maintenant.